Yaejin avait énormément de chance. Pourquoi? Deux raisons, principalement: nous n'avions rien de prévu à l'horaire aujourd'hui, et aucun manager ne s'est rendu compte qu'elle ne s'est pas présentée au dortoir à l'heure prévue la veille. Un détail qui a échappé également à quelques membres, surtout les plus jeunes; mais pas à moi et mon âme protectrice. C'est un peu pour cette raison que le rôle de leader m'a été attribué, je suppose. Cette volonté de m'assurer que tout le monde aille bien, et cette capacité de supporter et appuyer les filles dans leurs bons et mauvais jours, peu importe l'occasion.

Si son escapade nocture avait été découverte par quelqu'un d'un peu plus haut placé, elle se serait sans doute fait réprimander (et le mot est faible). Et voilà pourquoi Yaejin avait de la chance: son sort est entre mes mains, et ma manière de jongler avec cette situation sera... différente, disons. Hors des normes.

Adossée contre un mur à quelques rues de la destination que j'avais en tête, visage couvert d'un masque pour éviter les regards trop curieux, je tappe du pied, attendant impatiemment l'arrivée de Yaejin; celle qui a ce don de m'angoisser plus que je ne le devrais être. Malgré tous les ennuis que son caractère un peu trop provocateur et débordant d'énergie peu nous causer, la réalité est qu'elle est parfaitement unique, et que jamais je ne voudrais l'échanger pour une autre.

Mais bordel qu'elle me stresse!

Justement, la voilà qui arrive; je soupire et croise les bras après avoir jeté un dernier coup d'oeil à mon téléphone, à la recherche de l'heure. « Alors, t'étais où? » Un ton qui pouvait sonner un peu accusateur, mais qui était surtout mêlé à de l'inquiétude, un peu de peur, et surtout du soulagement. « La prochaine fois, est-ce que tu peux au moins m'avertir pour que je sache quel genre de mensonge dire à nos managers? » Pour l'instant, elle n'a pas à savoir qu'elle s'en est tiré saine et sauve.

La soirée s’était terminée tard, bien trop tard. En fait, ça avait duré toute la nuit. Un petit tour chez ses parents pour changer de vêtements, parce que le froid, elle pouvait résister, mais il y avait une limite, ce serait embêtant de tomber malade et de se faire cramer à cause de ça. Sans oublier d’innombrables bisous à sa petite chérie Nyx, son adorée petit chat. N’aillant pas dormi, elle s’était peut-être assoupie quelques instants avant de sortir comme une petite souris de l’appartement. Enfin, plutôt comme éléphant paniqué, l’alcool n’avait pas tout à fait eu le temps de disparaître de son système. En espérant qu’elle n’est pas réveillée ses parents, mais même si c’était le cas, ils n’en diraient pas grand-chose. Une foi son masque mis et ses écouteurs bien placés sur les oreilles, parce que quitte à avoir des acouphènes toute la journée, autant y aller jusqu’au bout, elle prit la route vers le dortoir des TiGirls.

Ce qui était plutôt pratique, c’est qu’il ne fallait pas énormément de temps pour aller du dortoir a chez elle, peut-être une vingtaine de minutes à tout casser. De ce fait, il n’était pas rare qu’elle y fasse un saut de temps en temps, ne serait-ce que pour aller chercher quelques affaires quand elle en avait besoin, parce que, sans paraître pour une grosse vantarde, tous ses vêtements ne rentraient clairement pas dans le dortoir, il aurait fallu une chambre en plus pour faire rentrer juste ses vêtements, alors c’était sans compter sa grande collection de livres et autres babioles, bijoux, chaussures, sac et le maquillage, surtout le maquillage.

Sans le moindre souci du monde, elle fit son bout de chemin, déambulant dans la rue fredonnant les titres qui défilait dans ses oreilles, dansant comme si elle était la seule dans l’univers. Il lui fallut un petit temps avant de remarquer la silhouette qui l’attendait, adossé à un poteau, un masque sur le visage. Elle s’arrêta, prenant encore quelques secondes pour enfin reconnaître la personne sous la casquette. Elle s’avança en sautillant, toujours inconsciente du moindre problème. « Unnie! » Tout en écoutant à moitié ce que son ainé disait, elle l’entoura de ses bras, s’avachit à moitié sur elle et lui déposa un bisou sur la joue à travers son masque. « Tu peux leur dire que ma fille me manquait trop! » Un rire niais suivit sa phrase, trahissant complètement son état encore second, s’il n’avait pas été trahi avant. Et bien sûr, par ‘sa fille’ elle parlait bien entendu de son chat Nyx, qui d’autre.

Elle ignore ma première question et répond un peu enfantinement à la deuxième, un comportement qui ne me fait que soupirer davantage. Tout ça pour son chat? Non, je n'y croyais pas trop. Et la réponse à ma question, ou du moins en partie, apparu soudainement sous forme d'un câlin et d'un bisou sur la joue, le tout accompagné d'une certaine odeur qui la trahit. « Non mais- Yaejin! » Elle pue l'alcool, elle n'est pas tout à fait sobre non plus semble-t-il. Mon coeur s'emballe et mon visage se crispe d'inquiétude, la volonté de la sermoner et de lui énumérer les mille et unes raisons du pourquoi sortir fêter sans en parler à quelqu'un est une mauvaise idée au bout des lèvres.

Mais je me tais, je soupire une dernière fois, et je la serre dans mes bras; un câlin d'une mère rassurée que son enfant aille bien.

« Allez, tu pues. » Je dépose ma main dans son dos et je la pousse en direction du dortoir, non loin d'où je l'attendais. Il faudra faire une escale avant mon activité planifiée, mais ça sera mieux ainsi. Tout le long de cette courte marche vers le dortoir, tant à l'extérieur que dans l'ascenseur jusqu'à ce que la porte soit close derrière nous, cette envie de la sermoner me reprend, envahie par un mélange d'inquiétude, de soulagement et de déception. Déception surtout envers moi, incapable de m'assurer que mes membres soient en sécurité en tout temps. N'importe quoi aurait pu lui arriver. Quelqu'un aurait pu glisser quelque chose dans son verre. Quelqu'un aurait pu vouloir prendre avantage de son état d'ébriété. Quelqu'un aurait pu mettre des photos et vidéos en ligne de son état, et risquer un scandale. Quelqu'un aurait pu lui faire du mal.

Je laisse mes inquiétudes de côté et je la guide vers la salle de bain, ne lui laissant pas le choix. « Saute dans la douche, ça va t'aider à reprendre tes esprits et à arrêter de sentir comme si tu t'étais roulée dans le soju. » En vrai, Yaejin avait une troisième raison de se compter chanceuse: les cinq autres filles n'étaient déjà plus à la maison, ayant vaquées à leurs propres occupations de jour de congé. Alors personne d'autre que moi ne sait qu'elle est ivre, à quelle heure elle est rentrée, dans quel état qu'elle est. Et alors que je laisse la plus jeune s'occuper d'elle-même dans la salle de bain, j'entre dans sa chambre et je fouille dans sa garde-robe moi-même. Tant pis si elle n'aime pas l'outfit.

Dans un état encore second, elle se laisse un peu plus allée à la seconde où les bras de son ainée se referment autour d’elle. Les yeux fermés, elle aurait pu s’endormir debout. Un rire grotesque lui échappe en entendant le commentaire de Gyuri et elle se laisse guider sans aucune protestation, fredonnant encore la dernière musique qu’elle avait entendue à la soirée. De tout le chemin vers le dortoir, elle accompagne la chanson dans sa tête de quelques pas de danse maladroite tout en continuant d’avancer. Elle essaye d’entraîner la leader dans son délire, elle lui prend les mains, tente de la faire danser, un sourire idiot au visage, comme si elle pouvait deviner la musique qui se jouait dans sa tête.

Et c’est toujours insouciante du moindre problème qu’elle arrive à l’appartement. « Mon lit! » Elle fait voler ses chaussures et s’apprête à sautiller jusqu’à sa chambre avant de se faire rediriger vers la salle de bain. Elle rigole d’un rire niais, bien amusé par les dires de son ainée. « Le soju était plutôt bon pour un truc de premier prix tu sais! » Madame aux goûts de luxe, ce n’est pas le genre de chose qu’on entend dans sa bouche tous les jours. Abandonnée dans la salle de bain, elle s’active à aller prendre une douche, non pas sans s’imaginer tout un concert au passage, chant et danse a l’appui. Elle finit tout de même par sortir et s’habiller, les idées déjà bien plus clair. La fatigue de cette soirée interminable commence à faire surface, et une seule solution apparue dans son cerveau. « Unnie! Viens on va manger un truc dehors, j’ai trop trop la dalle et il me faut un méga café extra extra large. » La gueule de bois est à la porte et elle a impérativement besoin de manger et boire quelque chose avant qu’elle ne vienne lui mettre un grand high kick dans la face.

Porte fermée derrière moi, je pousse Yaejin vers la salle de bain, elle qui aurait peut-être mieux voulu sauter dans son lit. Mais pas question qu'elle retourne se coucher; j'avais des idées de grandeur, aujourd'hui, et ça commençait par une douche. Je me contente de rouler les yeux quand elle mentionne du soju de « premier prix », la jeune membre étant un peu trop habituée aux divers luxes de ce monde. Faire partie d'un groupe de renom dès le début comme TiGirls n'aidait sans doute pas son cas. Mais bon, elle est encore jeune, elle a le droit de s'amuser, se découvrir, faire des expériences. Tant qu'elle reste saine et sauve, et tant que ses actions n'impactent pas les autres. En attendant, je serai là.

Alors que Yaejin se douche je lui prépare un outfit, sans vraiment me soucier si elle allait l'aimer ou non. Heureusement ce n'est pas une corvée ou une punition, l'outfit fait du sens, est quelque chose qu'elle porterait d'elle-même. Mieux vaut ne pas l'embarrasser davantage, non? Et finalement la jeune idole sort de la salle de bain, déjà un peu plus alerte. Good. C'est avec un regard amusé que je l'accueille dans sa chambre. « Belle prestation tu nous as offert là, Yaennie » Je tente de camoufler un rire ou deux, puis je me ressaisis, pointant les vêtements étendus sur son lit. « Tiens, met ça, ça devrait être bon. J'ai choisi des trucs bien alors plains toi pas trop, okay? » Mon ton est volontairement blagueur, il essaie de détendre l'atmophère, du moins pour moi-même. Yaejin est déjà suffisamment détendue.

Je sors de sa chambre et je prépare quelques items à mettre dans nos sacs à mains respectifs, juste au cas où. Juste le nécessaire, évidemment; et deux GoPros, si l'opportunité de s'en servir fait surface. Pourquoi ne pas joindre l'utile à l'agréable et préparer un peu de contenu? Ça ne pourrait que donner de bonnes faveurs à Yaejin, si son escapade nocturne venait à être découverte par l'agence. Et justement, la voilà qui sort de sa chambre, vêtue, prête à sortir. Et affamée, surtout. « Hmmm... j'avais déjà quelque chose de prévu, mais si tu veux aller manger quelque chose ailleurs, pourquoi pas? T'as une idée en tête? » L'efficacité même, j'avais déjà mes clés en main, prête à verrouiller la porte et suivre la jeune femme là où elle voulait manger.

Une douche et un concert imaginaire plus tard, la jeune fille sort de la salle de bain, enroulée dans une serviette, sous le regard amusée de sa leader. Un grand sourire se dessine sur ses lèvres et elle clôture sa performance avec une révérence trop exagérée à l’encontre de son ainée. Son regard se dirige vers les vêtements placés sur son lit et après un « Ok! » enthousiaste, suivi d’un petit rond fait avec les doigts, elle s’engouffre dans la pièce pour se changer en vitesse, non sans fredonner les restes de cette chanson qui continuait de trotter dans son cerveau. Elle ressort de la chambre tout habillée, l’énergie commençant peu à peu à quitter son corps, exprimant le besoin d’un café et surtout, de nourriture.

« Oh quelque chose de prévu? C’est vrai? C’est quoi? » Elle lance de grands yeux ronds et brillants dans la direction de Gyuri, courte tentative d’attendrissement. « Ok! J’ai ce café que j’ai vraiment envie d’essayer, apparemment, ils font de super bonne pâtisserie, on chope des cafés, de quoi se remplir l’estomac un peu et on va faire ce que tu as prévu! » Même pas le temps de lui laisser répondre qu’elle reprend rapidement. « Par contre, il faut que je me maquille d’abord, pas question de sorti avec cette tête! » Et avec ça, elle disparaît à nouveau dans la salle de bain, laisse la porte ouverte cette fois pour continuer de discuter avec son ainée. Elle qui ne pouvait pas sortir sans maquillage, elle en avait besoin aujourd’hui plus que tout, hors de question de se montrer en public avec des cernes sous les yeux. Heureusement, ses mains habiles avaient plus que l’habitude de manier pinceaux et rouges à lèvres, alors en moins d’une petite demi-heure, elle était déjà prête, subtilement maquiller pour un effet sans makeup et rapidement recoiffée d’un coiffé-décoiffé qui donnait l’illusion d’une préparation à la va-vite tout en effaçant la moindre trace d’une soirée passée. « C’est bon! On peut y aller! »

Regard amusé à l'oeil, elle porte sa main à sa bouche pour estomper ce rire naturel qui lui vient à la vue de Yaejin qui se prosterne, beaucoup trop fière de sa performance. Et elle feint une toux en se tenant la gorge, en essayant de prétendre qu'elle ne riait pas, pour reprendre le sérieux. Parce qu'au final, il ne faut pas qu'elle oublie qu'elle était tout de même un tout petit peu en colère contre la jeune femme, même si les plans qu'elle a prévu n'avaient rien d'une punition. Réellement, elle ne sait pas trop ce que ça va donner, si ces attentions que la leader porte envers la plus jeune du groupe l'aideront à se sentir peut-être plus à l'aise, à faire naître un minimum de maturité. Elle n'en sait rien, mais elle essaie tout de même.

Alors elle lui prépare des vêtements, quelque chose qui fait du sens; elle pense déjà à l'endroit où elle l'amènera manger, et aux autres activités qu'elles feront en cette journée de congé. Et finalement, elle n'est pas capable de retenir ce deuxième rire lorsque Yaejin lui fait les yeux doux, le coeur trop facile à attendrir. « Ça, tu le sauras quand on y sera. Patience, padawan! » Quelque chose que cette bombe d'énergie en face d'elle avait besoin d'apprendre, également.

Et, de toute façon, même si Gyuri voulait lui parler de ses plans, Yaejin ne la laisse pas placer un traître mot. Elle chante les louanges de ce café qu'elle veut tant essayer, avant de changer immédiatement de sujet et de vouloir s'occuper de son visage. Incorrigible Yaejin. « Non mais tu es b- » Bien comme ça, qu'elle voulait dire, Gyuri; mais Yaejin était déjà partie, et impossible de l'arrêter dans son élan. Alors elle en profite pour se faire une petite beauté de son côté, sachant pertinemment que sa cadette prendra beaucoup plus que quelques secondes devant le miroir.

« Woah, j'ai cru j'allais mourir de vieillesse! » Elle était déjà de retour dans l'aire commune, déjà prête à sortir, perdue parmis l'algorithme des réseaux sociaux à attendre que la jeune femme ait terminé. Et elle se relève du canapé, sourire aux lèvres, le rire léger. « Allez, trainons-pas ici plus longtemps. Je commence à avoir faim, moi aussi. » L'estomac qui gronde, qui dictera leurs pas pour les minutes à suivre.

Le soleil plombe déjà sur leurs visages, et Gyuri remet son masque et pousse sa casquette contre son front à la recherche d'un peu d'ombre et de sûreté. Mais les voilà toutes les deux sur le trottoir, et la plus vieille ne sait pas où aller. Alors elle suit la plus jeune, tentant d'ignorer cette faim qui fait soudainement surface « C'est loin, ton truc? »

Fière de son petit effet, elle rit devant son aînée qui tente de retenir son rire. C’était sa tactique, ça l’a toujours été depuis qu’elle est toute petite. Une bêtise, elle n’avait qu’à faire les yeux doux à son père pour qu’il passe a autre chose et la couvre de cadeau à nouveau, ou faire son cirque pour faire rire sa mère et s’en sortir avec un petit avertissement vite oublié. Les conséquences, ce n’est pas vraiment un concept qui lui est particulièrement familier. Alors naturellement, elle fait ce qu’elle a toujours fait, faire rire son monde pour que tout le monde soit copain et content.

Elle s’habille, tente de découvrir la fameuse surprise que sa unnie lui a préparer à coup de grands yeux de chien battu, mais échec, alors elle n’insiste pas plus, ne lâchant qu’un rire à la référence, et passe déjà à autre chose, l’attention aussi volage qu’une feuille d’automne dans une tornade. Et comme telle, la voilà déjà dans la salle de bain à se pouponner pour cette petite sortie de dernière minute. À savoir où elle trouvait toute cette énergie après une nuit entière à faire la fête. La fougue de la jeunesse sûrement, peut-être un peu d’hyperactivité dans le mix.

Une bonne demie heure plus tard, la voilà plus fraîche qu’après une bonne nuit réparatrice, du moins en surface. Un autre rire retentit. « T’exagère j’ai été rapide comme l’éclair! » Sac à main en main, elle suit la leader vers la sortie du dortoir et, une fois sous le soleil déjà bien haut du matin, elle passe son bras sous celui de la jeune femme et l’entraîne vers la fameuse destination. « C’est pas si loin que ça, une petite dizaine de minutes tout au plus! Tu vas voir, ça vaut le coup. » Et elle l’entraîne avec un peu plus d’enthousiasme, pressée d’arriver et de pouvoir enfin prendre une grande gorgée de café et remplir son estomac qui crie famine.

L'ainée roule ses yeux si fort qu'ils auraient pu sortir de leurs orifices, chaque parole de la plus jeune étant plus ridicules que les précédentes. Rapide comme l'éclair, qu'elle dit, alors que Gyuri croyait que son estomac allait se désintégrer dans la minute qui suit. Réellement, elle ne pouvait pas se plaindre. Yaejin avait, après tout, été un peu plus rapide qu'à ses habitudes. Et Gyuri décide de s'agripper à cette petite victoire, ne lui daignant comme réponse qu'un simple « pffff », sa main qui encourage la plus jeune à sortir du dortoir plus rapidement.

Gyuri est entraînée vers l'endroit de prédilection, leurs pas qui les guident en direction opposée du Lotte World. Et elle ne sait pas trop si elles arriveront réellement à faire ce que la leader a planifié, à force; mais la journée est encore jeune. Le soleil qui plombe, la casquette fermement appuyée sur sa tête. La marche se fait courte, mais suffisamment longue pour que la plus vieille se perde dans ses pensées. Elle est ravie, Gyuri, que Yaejin se porte bien; ravie qu'elle soit tout sourire malgré sa soirée arrosée, que son entrain habituel ne se soit pas échappé. Elle est soulagée, Gyuri, que Yaejin ne semble pas avoir été en danger, ne semble pas blessée, ou pire. Mais cette inquiétude règne au creux de ses entrailles, et elle espère que distraire la jeune femme l'encouragera, d'une certaine manière, à lui faire confiance davantage. À l'éloigner du pétrin, ou, dans le pire des cas, à l'encourager à la contacter au moindre signe de soucis.

Et parfois, elle se demande si elle s'y prend de la bonne façon.

« C'est ici? » Les deux corps s'arrêtent devant un café local, et l'estomac de Gyuri gronde, cette fois-ci très audiblement. Pas de temps à perdre, donc. La porte poussée, elle traîne doucement Yaejin avec elle vers la petite file d'attente, où elles y resteront jusqu'à ce que ce soit leur tour, quelques secondes plus tard. « Bonjour! Je voudrais un americano glacé, un croissant et un sandwich déjeuner, s'il vous plaît. Toi, tu veux quoi? » Elle termine sa phrase en fixant Yaejin, tentant d'ignorer le regard de l'employé à la caisse qui les avait visiblement reconnues. Et son propre regard se veut insistant, alors qu'elle a déjà son portefeuille à la main. C'est Gyuri qui paie, et c'est tout.