Il lui a fallu du temps avant de se décider. Ce petit salon de tatouage qu’elle a repéré quelques mois plus tôt. Elle ne s’est jamais imaginé travailler dans un salon de tatouage, elle n’en a pas l’intention à vrai dire, elle ne compte même pas pratiquer le tatouage sur de vrais clients, mais elle a envie d’apprendre, d’apprendre plus que ce qu’elle peut trouver chez elle, apprendre d’autres techniques, d’autres savoir-faire. Alors il l’a tenté pendant longtemps ce salon, et ce n’est que quelques semaines plus tôt qu’elle a enfin pris son courage à deux mains, qu’elle y est entré. Ils étaient tous très gentils et elle s’est vite lié d’amitié avec certaines personnes. La patronne, très gentille qui la laisse observer les tatoueurs qui le veulent bien et qui la laissent s’entraîner un peu sur les peaux synthétiques. Et ce jeune homme qui la laisse l’observer et lui poser des questions. Alors elle vient de temps en temps, lorsqu’elle veut s’échapper de sa vie tirée à quatre épingles, prenant le nom de Mingi pour garder cette petite activité la plus secrète possible.

C’est ce qu’elle a fait aujourd’hui. Quand même ses pâtisseries ne suffisent plus à faire retomber la pression. Elle est venue les bras remplit de gâteaux, comme elle le fait toujours, un quatre-quarts et des muffins qu’elle a distribué parmi les employés et une boîte de cookies qu’elle a gardé près d’elle pour ceux qui veulent passer la voir, tous cuisiner le jour même. Devant les fourneaux à la seconde ou sa mère a quitté son appartement, a essayer des recettes, plus ou moins ratées, mais rien à faire, ses mains ne s’arrêtaient pas de trembler, le poids dans sa poitrine ne se soulevait pas, alors elle est venu ici, en dernier recours, les bras chargés de ces quelques réussites de la journée.

Elle a beau aimer la compagnie, elle s’est isolée dans une salle inoccupée cette fois-ci. Azazel a un planning chargé aujourd’hui et elle n’a pas vraiment la tête à poser des questions ou simplement à socialiser. Alors elle est là, jonglant entre les croquis sur sa tablette et les testes sur peau synthétique avec son dermographe. Les carrés se remplissent et s’enchaînent, un puis deux puis le troisième est vite entamé, remplit de petits animaux en tout genre, elle teste différents styles tout en restant fidèle à elle-même, la musique qui remplit la salle, le train de plus en plus stable, la respiration de plus en plus sereine. Elle a enfin oublié le stress de la journée. Et c’est sur une série de petit lézard que la porte de sa salle s’ouvre, la tirant instantanément de sa concentration, prête à décamper rapidement si quelqu’un a besoin de la salle. Mais quelle fut sa surprise quand un homme qu’elle n’a jamais vu apparu dans l’encadrement de la porte pour… des retouches? « Je… Je suis désolée, vous avez dû vous tromper de salle, je ne fais pas de tatouage… » Une voix douce, assez faible, mais surtout, peu rassurée, presque nerveuse. Elle ne s’attendait pas à tomber sur quelqu’un.