Elle n’attend qu’une seule chose, Sol, c’est de s’étaler sur le canapé et de demander à ses colocs si l’un d’eux veut commander des pizzas, ce soir. La journée a été longue. Sauf que toutes les journées sont longues quand on déteste son job. Elle soupire en rentrant dans le bâtiment. Combien d’années encore avant la retraite, ugh ? Le regard se relève lorsqu’elle reconnait le son distinct de l’ascenseur. Le pas s’accélère. « Attendez, s’il vous plait » qu’elle lance à l’intention de la personne qui y rentrait.

Elle se glisse avant que les portes ne se referment. Elle souffle, fatiguée par sa micro course entre la porte d’entrée et celle de l’ascenseur — elle n’a jamais été sportive, Sol. Au lycée, elle n’avait d’yeux que pour l’art, le reste des matières scolaires n’a jamais eu sa place dans sa tête. « Merci » qu’elle articule entre deux souffles saccadés. Elle se tourne vers l’inconnu qui partage la boîte métallique et le sourire courtois (et faux) qu’elle allait lui adresser à un de ses voisins retombent d’un coup. Et soudainement, elle remercie le ciel, les dokkaebi, les bonnes vibes du mardi ou whatever, d’avoir fait un effort ce matin pour aller au travail et d’avoir enfilé une tenue qui ne soit pas un jogging taché. Parce qu’à la radio, personne ne voit sa tête, de toute façon. « Euh, bonjour. » Le regard se baisse. Elle l’a déjà croisé plusieurs fois, ce gars : dans l’entrée, dans l’ascenseur, parfois même à son étage mais elle n’a jamais compris dans quel appartement il habitait. Aujourd’hui encore, le même bouton est illuminé.
Troisième étage.

C’est bête mais elle sent son coeur qui s’emballe. Elle a l’impression d’être une enfant. Elle ne se souvient même pas de la dernière fois où elle s’est sentie comme ça. Elle ne peut pas l’expliquer, Sol, mais il est beau, ce voisin du troisième. Elle voudrait le peindre, elle voudrait avoir le temps d’observer tous ses traits, de les mémoriser. Comme son coeur, sa tête s’emballe. Elle ne connait même pas son nom. Elle ouvre la bouche, Sol, pour commencer du small talk mais l’ascenseur fait un bruit étrange, tremble et puis, s’arrête entre le premier et le deuxième. Elle cligne des yeux, Sol, confuse. « Euh ? » Elle appuie sur le bouton « 3 » mais rien ne se passe. Elle appuie encore. Puis encore mais rien ne bouge. Elle se tourne vers le bel inconnu et d’une voix tremblante, elle dit : « Je … Je crois que l’ascenseur est bloqué. » Elle n’est pas sûre, Solbin, si elle devrait être contente ou pas. Être coincée avec un gars pas du tout désagréable à regarder, est-ce vraiment si mal, au final ?