« Coucou ! J'ai apporté le dessert », que tu articulas d'une voix enjouée, le sourire large et le regard pétillant. Ce n'était pas grand chose, juste un petit gâteau que tu avais réalisé dans la journée. Histoire de ne pas rendre visite à Aaron les mains vides. Tu n'aimais pas ça, arriver sans rien à offrir – ta présence n'était pas assez grande pour qu'elle suffise de toute évidence. Il te fallait autre chose. C'était ton jour de repos aujourd'hui, tu avais pensé que c'était le jour idéal pour voir ton cousin. Tu ne voulais pas rester seule à l'appartement, à sombrer dans diverses pensées peu joyeuses. Il te fallait un peu de compagnie – mais pas non plus tout le monde et n'importe qui. Tu aurais pu aller faire les magasins mais l'idée ne te tentait pas vraiment. Tu ne voulais pas être seule – tu voulais passer du temps avec quelqu'un avec qui tu te sentais bien et en sécurité. Tu ne voulais pas penser au cauchemar que tu retrouveras ce soir en retournant chez toi. Tu voulais t'en éloigner un peu. Juste un peu. Reprendre ton souffle ailleurs, te vider la tête comme tu le pouvais même si tu ne pouvais pas entièrement. Les manches longues couvrant tes bras n'étaient pas là parce que tu avais froid mais couvraient des marques que tu étais peut-être les seules à voir. Un bleu à peine visible sur l'avant-bras – mais ça t'angoissait assez pour que tu veuilles le cacher. Tu ne voulais surtout inquiéter personne, et surtout pas Aaron. « Comment tu vas ? J'espère vraiment que je ne dérange pas », fis-tu doucement, la frimousse embêtée mais l'air plein d'espoir. Faire demi-tour maintenant serait un échec ; et tu n'avais pas encore envie de retourner à l'appartement. Tu n'avais pas encore envie de te perdre dans tes pensées sombres entourées de questions où tu n'auras jamais de réponses. « Qu'est-ce que tu me racontes de beau ? », vins-tu l'interroger, les prunelles brillant de curiosité. « Le travail se passe bien ? Tu te reposes assez ? Est-ce que tu veux que je te prépare quelque chose à manger ? Déjà que je suis là, autant en profiter... non ? », t'étais sa mère ou quoi ?

@Choi Aaron

« Tu as bien fait, merci. » La remercia-t-il, avant de prendre le fameux dessert puis le poser sur ses jambes. A l’aide de ses mains, il fit rouler les roues de son fauteuil en arrière pour reculer puis laisser sa cousine pénétrer à l’intérieur de sa maison. Mi Rae connaissait les lieux, donc il lui faisait confiance pour le suivre et faire comme chez elle, si elle le souhaitait. C’était la direction de la cuisine que prit Aaron, afin de mettre le dessert au réfrigérateur. « Je te sers quelque chose à boire ? » Tout dans ce logement avait été agencé pour être à sa hauteur, pratique et facilement attrapable, puisque à l’intérieur, le garçon retirait toujours ses prothèses. Ce n’était pas quelque chose qu’il appréciait particulièrement, principalement lorsqu’il avait des invités, néanmoins son invité n’était pas n’importe qui, il s’agissait de sa cousine. Elle était au courant de son handicap, il n’avait pas besoin de lui cacher quoi que ce soit, même si c’était plus fort que lui d’en être toujours un peu gêné. « Bien sûr que non tu ne me déranges pas, tu peux venir quand tu veux. » Cela lui faisait toujours plaisir de la voir et passer du temps avec elle. « Mais je vais bien et toi, comment ça va ? » Ses yeux se posèrent sur elle à cette question, une expression emplie de douceur brillant dans ses pupilles, sans pour autant remarquer l’embarras de la jeune femme, causé par ses bleus qu’il ne voyait pas. Certainement que s’il savait, Aaron se reprocherait cette indifférence, ne pas avoir remarqué le mal-être de sa cousine et ô combien elle avait besoin d’aide. « Pas grand-chose. Tu sais ma vie n’a rien de palpitant, c’est toujours la même routine. » Rigola-t-il doucement. « Et toi ? » Evidemment, il y avait des journées plus intéressantes que d’autres, cependant Aaron n’avait rien de particulier à raconter. « Je crois pouvoir me débrouiller pour me faire à manger. » Son ton était taquin alors qu’il riait légèrement de plus bel, amusé par sa cousine qui semblait s’inquiéter beaucoup pour lui. « Mais tout va bien, et je me repose assez aussi, ne t’en fais pas. » Après ce qu’il avait traversé, il comprenait que ses proches pouvaient devenir plus protecteur, plus soucieux à son égard, par peur sûrement de ne pas voir sa détresse et qu’il commette une nouvelle fois l’irréparable. « Tu veux qu’on prépare un truc ensemble ? Ou on peut commander sinon si tu veux ? » Puisque si Mi Rae désirait lui cuisiner quelque chose, c’était qu’elle n’avait toujours pas dîner non plus, n’est-ce pas ?

@Cho Mi Rae