Est-ce vraiment une bonne idée pour moi de me perdre dans une maison abandonnée ? Seul ? Non. C’est sûrement idiot et irresponsable de ma part ! J’en ai conscience, mais je n’ai pas pu m’empêcher d’avoir envie d’essayer. J’ai l’impression que la moitié de ma jeunesse (si pas plus) s’est déroulée à l’hôpital, un quart se passait aux funérailles de mes amis rencontrés en chambre d’hôpital ou assis en cercle à l’une de ses rencontres de groupes de soutien… puis le dernier quart, j’essayais d’avoir une vie “normale”. Les activités qu’on me laissait faire étaient limitées, bien que je comprenne les raisons et que c’était tout à fait valide. Si je suis encore en vie aujourd’hui, c’est sûrement grâce à ses restrictions qui m’embêtaient pourtant tellement. Mais j’avais toujours eu envie d’aller explorer une de ces fameuses bâtisses abandonnées. Je me demandais si c’était vraiment aussi effrayant qu’on le prétendait.

Peut-être que ce l’est pour… les voyants ? À moins que je passe à côté d’une chose importante… Est-ce que je suis vraiment dans la maison dont tout le monde parle, en ce moment ? Halloween approchant, j’ai entendu quelques rumeurs sur cet endroit. J’ai pris un taxi pour y venir, même si le chauffeur me déconseillait chaudement d’y poser les pieds. Moi, j’étais trop curieux. Rien ne devrait m’arriver, ce ne sont que des histoires pour se faire peur, non ? J’avoue que je me suis pris les pieds dans le tapis, lorsque je suis entré. La poussière m’a sauvagement attaqué et m’a fait tousser comme si je fumais la clope depuis mon troisième jour de vie. Les poumons qui brûlent, la gorge qui irrite… ça commence bien. Je ne me laisse pas abattre pour autant et me relève, m’assurant que ma canne est toujours entière. J’aurais l’air bien con si je la perdais ou si je la cassais… Déjà que ce sera sûrement compliqué de ressortir d’ici !

Quoi ? J’aurais dû y penser avant ? Peut-être bien, ouais. Qu’est-ce que je ferai si je me perds trop ? Mon téléphone est-il chargé ? Je crois bien… J’appellerai un de mes proches au secours, acceptant mon affreux sort de me faire réprimander pour avoir voulu m’amuser comme tout le monde ! J’essaie d’abord de trouver le mur, cherchant à tâtons un quelconque interrupteur. Je ne suis pas complètement plongé dans le noir, alors si l’électricité fonctionne toujours, je pourrai percevoir une très faible lumière.

BEURK !
Dans quoi aie-je mis la main ?! Qu’est-ce qu’il y a sur ce mur ? Est-ce que je veux vraiment le savoir ? Sûrement pas. Je grimace, retenant un haut le coeur, alors que je secoue ma main pour l’en débarrasser de je-ne-sais-quoi. J’abandonne l’idée de la lumière. La noirceur ne me fait plus peur depuis quelques années maintenant, on s’y habitue. Le plancher craque sous mes pas… mais pourquoi continue-t-il de craquer… alors que je ne marche plus ?

-« Il y a quelqu’un ? » lançai-je, l’incertitude venant tressaillir sur le son de ma voix.

Est-ce que je voulais vraiment une réponse ? Si c’est une voix douce et chaleureuse, pourquoi pas ! C’est toujours sympa de se faire de nouveaux amis ! Mais si c’est une voix d’outre-tombe ? POURQUOI JE PENSE À ÇA MAINTENANT ? Je ne pouvais pas y penser avant ??

OOTD _ Halloween était certainement l’une des fêtes préférées de la chinoise. Yin Hua appréciait particulièrement l’atmosphère unique autour de cette célébration. Les rues se métamorphosaient en un spectacle éblouissant de citrouilles illuminées, de toiles d’araignée et de costumes effrayants. Pendant cette période de l’année, c’était aussi le moment idéal pour organiser des marathons de films d’épouvante et d’horreur. Cette période était également l’occasion de visiter des endroits sinistres, réputés pour être hantés. C’était précisément ce que Yin Hu avait choisi de faire ce soir, en solitaire, sans crainte, car les fantômes et autres créatures mystiques de la nuit n’existaient pas.

La mannequin s’était donc rendue à cette maison abandonnée dont elle avait eu vent. L’endroit avait une aura particulière, presque palpable. Les ombres s’étiraient sur les murs décrépits, comme si elles murmuraient des secrets oubliés depuis longtemps. Une brise légère soufflait à travers les fenêtres cassées, faisant danser la poussière dans l’air. Malgré le silence qui régnait, Yin Hua pouvait sentir une énergie étrange qui emplissait chaque recoin. Les vestiges du passé semblaient imprégner les lieux, créant une atmosphère à la fois envoûtante et intimidante. Alors qu’elle avançait prudemment à travers les pièces, la jeune femme perçut soudain un bruit de craquement, semblable à celui d’un pas lointain. Son coeur s’emballa, mais elle ne recula pas. Au contraire, elle décida de se diriger vers ce bruit étrange. Ce n’était ni un chat, ni un rat. Le bruit résonnait trop lourdement pour être simplement produit par un petit animal. Son intrigue ne faisait que croître à mesure qu’elle avançait, puis une voix s’éleva. Elle se figea un instant, le coeur battant à nouveau la chamade. Yin Hua ne répondit pas. Au lieu de cela, elle reprit le pas lentement en direction de la voix, son regard scrutant l’obscurité à la lueur de la lampe torche, le parquet craquant également sous ses pas.

La lumière dansa sur les murs, balayant les recoins sombres de la pièce, révélant chaque détail, chaque fissure. Puis, doucement, une ombre masculine prit forme dans l’halo lumineux. Ses contours se dessina lentement, révélant une silhouette mystérieuse. L’homme dos à elle resta immobile et silencieuse. Elle l’observa un instant silencieuse, s’approchant très lentement avec précaution et une fois arrivée à sa hauteur, sa main se posa doucement sur l’épaule de celui-ci. « Excusez-moi… » articula-t-elle, sa voix teintée d’un ton étrange, involontaire, résonnant dans cette pièce poussiéreuse et effrayante. La réaction du garçon, soudainement alerté par sa présence, l’obligea à reculer. Venait-elle de lui faire peur ? Il faut croire.

Les odeurs de poussière et de… je-ne-saurais-dire-quoi sont puissantes dans cette… maison abandonnée ? J’entends le vent souffler dans les branches des arbres, dehors, qui viennent ensuite grincer contre les fenêtres. Le vent n’est pas très fort, mais suffisamment pour faire siffler la maison aussi. Les planches craquent sous mes pieds. J’ai l’impression d’être dans un de ces films que j’écoute avec Yoo Kyung et Sujin, en cette période horrifique. Mon meilleur ami s’amuse souvent à me décrire ce qui se passe dans les films, se prenant pour le tueur en série et me prêtant le rôle de la victime. Non, je ne me suis jamais posé de questions sur sa santé mentale… J’ai toujours eu confiance qu’il n’avait pas un grain de psychopathe en lui ! Cependant, j’aurais peut-être dû me remettre moi-même en questions. Est-ce que j’ai un grain de victime en moi ? C’est pour ça que j’ai eu la brillante idée de m’aventurer en ces lieux questionnables ? Peut-être que la vie essayait de me tuer jeune pour m’éviter un horrible destin…

J’ai quand-même des réflexions très positives, n’est-ce pas ? J’essaie de les balayer avec plus de vigueur que la dernière femme de ménage ayant mis les pieds dans cet endroit. J’abandonne rapidement l’idée de trouver un interrupteur quelconque sur un mur, puisque j’ai mis la main dans… je-ne-sais-quoi encore une fois. La texture m’a toutefois bien dégoûté ! C’était humide, froid, visqueux… Je crois que j’aurais préféré une toile d’araignée. Je m’arrête après quelques pas, me disant qu’il vaut mieux que je me fasse un plan avant de continuer.

Si je ne bouge plus… pourquoi est-ce que j’entends toujours… le plancher qui craque ? J’essaie de rationaliser. Les fantômes, ça ne marche pas, ça vole ! Puis de toutes façons… ça n’existe pas ! Les zombies non plus, ça n’existe pas. Pas plus que les monstres… Mais ces deux options ont de grandes chances de marcher ! Je déglutis et finis par demander si quelqu’un est là.

Aucune réponse.
Pourtant, le bruit des pas ne cessent pas pour autant. Les humains… de manière générale, sont supposés pouvoir répondre. Les zombies et les monstres… pas nécessairement. Ma dernière heure sonne-t-elle finalement ? J’ai l’impression que les bruits se rapprochent de moi. Mon sang se glace dans mes veines alors que j’essaie de penser à ce que je pourrais faire pour me défendre.

Je ne vois rien.
Je n’ai rien apporté non plus pour éventuellement sauver ma peau.
La dernière chose que j’ai touché (bien que dégueulasse) ne m’aiderait en rien.

Je sursaute violemment en sentant une main (d’outre-tombe ?) se poser sur mon épaule, accompagnée d’une voix qui me file la chair de poule.

-« Excusez-moi… »

J’amène immédiatement ma main à mon coeur qui se débat afin d’aller se mettre en sécurité. Heureusement que je ne suis pas cardiaque. J’hésite une seconde, prend une grande inspiration puis me retourne lentement vers la voix. Je suis d’abord surpris de déceler un peu de lumière dans la noirceur ambiante. Impossible pour moi de deviner une silhouette ou quoique ce soit, évidemment vu ma condition.

-« Je suis mort ? » demandai-je, confus, pendant une seconde.

Avais-je perdu la vie, d’une manière ou d’une autre, après être entré dans cette étrange maison et un ange venait me chercher ? QUOI ?! MÊME MORT, JE SERAIS ENCORE AVEUGLE ? Je me suis habitué à ma condition, mais je me sens quand-même un peu arnaqué. Moi qui pensait qu’au moins je retrouverais la vue, une fois trépassé. Je me pince d’ailleurs le poignet, juste à côté de mon bracelet rouge qui m’unit à mes deux meilleurs amis. Je ressens la sensation désagréable. Je ne suis pas mort.

-« Êtes-vous un fantôme ? » demandai-je alors, peinant à croire qu’une telle voix puisse être humaine. « Vous avez… besoin d’aide… pour passer de l’autre côté ? » ajoutai-je, espérant vraiment très fort que c’était un gentil fantôme.

Mon regard éteint se perdait tout simplement dans sa direction, n’arrivant probablement pas à s’arrêter sur elle pour autant. Je rapprochai lentement ma canne de moi, n’ayant pas envie d’être impolie et de l’empaler avec.

OOTD _ Oui, Yin Hua avait pensé à la probabilité de croiser des individus, qu’ils soient des aventuriers en quête d’expériences paranormales ou des acteurs cherchant à rendre les lieux aussi effrayants que les rumeurs le prétendaient. Cependant, la chinoise ne croyait pas en ces histoires de fantômes, car son esprit demeurait très réaliste. La raison pour laquelle, lorsque sa torche éclaira la personne à l’origine probable des bruits qu’elle avait entendus, elle ne sursauta pas, démontrant comme toujours un sang-froid remarquable. Contrairement, au jeune homme qui fût pris de peur lorsque sa voix étrangement calme et presque dit dans un souffle s’adressa à lui. Elle ne lui dit rien pour le calmer, observant juste sa réaction qu’il faut l’avouer était en quelque sorte amusante. Tout comme les questions qu’il lui posait sans qu’elle ne daigne lui répondre instantanément. Elle l’observa en silence. Avait-il associé sa présence à celle d’un fantôme à cause de la lumière éblouissante qu’elle émettait dans sa direction ? Certes son teint était plutôt pâle, mais loin d’être livide et sans vie comme celui d’un mort ou même spectre. « Un fantôme ? »  Elle s’approcha lentement de lui, et une fois à proximité de lui, ses doigts vinrent pincer le bras du garçon sans aucune délicatesse. « Les morts ne ressentent pas la douleur donc tu n’es pas mort. » Dans la logique, un mort ne pouvait ressentir de douleur physique, puisqu’il n’était qu’un spectre sans enveloppe charnelle. Il en était de même pour les fantômes, ces entités dépourvues de corps matériel. Hors, Yin Hua était bien faite de chair et de sang. « Et si j’étais un fantôme je n’aurai pas pu te pincer. » ajouta-t-elle, soulignant ainsi sa nature réelle.

Ses yeux scrutèrent le garçon qui ne semblait pas réellement la regarder, fixant un point dans une direction qui n’était pas la sienne. Voyait-il réellement un fantôme ? C’était sûrement ce que Yin Hua aurait pu se poser comme question si elle n’était pas aussi terre-à-terre. « Qu’est-ce que tu fixes comme ça, tu vois un fantôme sur le côté ? » Afin de s’en assurer, elle tourna la tête, mais il n’y avait absolument rien, juste un mur tapissé d’un horrible papier peint tout défraîchi. Son regard se reposa à nouveau sur le garçon qui ne semblait toujours pas la regarder. Ses sourcils se froncèrent légèrement tandis qu’elle restait silencieuse. La chinoise agita sa main devant le visage du garçon, qui ne montra guère de réaction. Ses yeux glissèrent sur la canne, dont n’avait pu saisir l’utilité au premier coup d'œil. « Qu’est-ce qu’un non-voyant vient faire ici tout seul ? Une maison hanté… Un choix de destination plutôt audacieux. » Ou bien suicidaire, au choix. Certes, les malvoyants pouvait être parfaitement autonomes et se promener où bon leur semblait, mais cette maison était truffée d’objets poussiéreux et de substances dont il valait peut-être mieux en ignorer la nature. Sans parler des nombreuses bestioles, qu’elles soient animales ou insectes, qui pouvaient résider ici.

Avais-je fait un bon choix en décidant de venir (seul) dans cette maison ? La majorité des gens diront sûrement que non. Pourtant, je l’avais tout de même fait. La curiosité et l’envie de vivre une aventure inusitée l’avait emporté sur la raison et la logique qui m’ennuyaient. Ma condition a changé au fil des années, mais mon désir de tout vivre ne m’a jamais quitté. Je ne sais pas trop si mes parents en seraient fiers ou découragés… je ne suis pas certain non plus que je leur partagerai cet épisode, puisqu’il pourrait grandement les inquiéter ! J’ai tout de même un minimum conscience des dangers qui me guettent en venant ici, mais les gens qui voient tout en HD aussi peuvent se blesser. Ils ne s’empêchent pourtant pas de venir ici ! J’ai un handicap de plus, c’est vrai, mais cela me rend simplement l’expérience différente ! Je la vis sous un autre angle, tout simplement. Les gens aiment bien se couvrir les yeux au lit, afin de vivre des sensations moins communes, pourquoi serait-ce mal que je tente quelque chose de similaire, hors des draps ? Possiblement parce que je pourrais tomber sur un fantôme… et y laisser ma peau ! Mais ça, les voyants aussi peuvent le vivre. Le fantôme se montre d’ailleurs bien silencieux, ne souhaitant en rien me rassurer sur la situation ou me faire comprendre que je ne suis pas mort. Je ne le suis pas vraiment, non ? Sinon, j’aurais recouvré la vue, non ? Puisque je l’avais, il y a encore quelques années de cela. Simplement, je l’ai troqué en échange de la possibilité de vivre plus longtemps.

-« Un fantôme ? »

Alors que je viens moi-même de me pincer, je sens un autre pincement désagréable.

-« Ouch ! C’est bon ! Je venais de le faire moi-même ! » commentai-je sous la surprise, en reculant d’un pas.

Heureusement que je n’ai pas envie de pipi. Le fantôme viendrait m’aider pour ça aussi ? Ce serait tout de même assez malaisant comme situation !

-« Les morts ne ressentent pas la douleur donc tu n’es pas mort. »

Je pince légèrement les lèvres, passant mon autre main sur mon pauvre bras meurtri. Je sais que certains gens apprécient la douleur et toutes ces choses, mais ne sont-ils pas supposé en discuter avant ? Établir les limites et se mettre d’accord sur le déroulement ?

-« Et si j’étais un fantôme je n’aurai pas pu te pincer. »

-« Ça, c’est encore mitigé. Les scénaristes de films et dramas ne sont pas tous d’accord là-dessus ! Parfois, les fantômes touchent les gens et apparemment que c’est très froid ! Parfois, ils balancent les objets aussi pour faire peur. » argumentai-je, même si ce n’était sûrement pas nécessaire ?

La réplique avait traversé mes lèvres sans que je prenne le temps de vraiment y réfléchir. Il y a longtemps que je n’ai pas vu un film ou un drama, mais j’aime bien en écouter avec mes proches et qu’ils me décrivent les images. Leurs commentaires rendent souvent l’expérience plus amusante. Puis, même si j’écoute plusieurs fois les mêmes, les histoires semblent légèrement différentes dépendant d’avec qui je suis parce que tout le monde ne décrit pas les mêmes aspects et ils ne le font pas tous de la même manière non plus. Honnêtement, est-ce vraiment le lieu et le temps de débattre de ça ? Sûrement pas.

-« Qu’est-ce que tu fixes comme ça, tu vois un fantôme sur le côté ? »

-« Non ? Je ne vois… rien… de particulier ? » répondis-je en haussant un sourcil confus.

La personne ou le fantôme (je ne sais pas encore) ne doit pas avoir capté mon handicap encore… mais cela ne tarde pas trop. Je sens une très légère brise accompagnée d’un doux parfum, devant mon visage. Les gens ont cette tendance à passer leur main, pensant que parce qu’on ne le voit pas, on ne le capte pas. Les yeux sont éteints, mais pas les autres sens.

-« Qu’est-ce qu’un non-voyant vient faire ici tout seul ? Une maison hantée… Un choix de destination plutôt audacieux. »

-« Je viens vivre des sensations fortes ? Comme tout le monde ? » dis-je tout naturellement, n’ayant pas réellement d’autres raisons. « Pour le moment, elle semble surtout… poussiéreuse et sale… mais niveau fantôme… vous êtes la première que je croise et vous dîtes ne pas en être un. » ajoutai-je en haussant légèrement les épaules.

Je n’allais pas me plaindre de ne pas être torturé par une entité de l’autre monde, cela dit.

-« Vous ? Vous avez vu quelque chose de particulier ? » en profitai-je pour demander, puisque la demoiselle semblait avoir ce sens qui me manquait.

OOTD _ Avait-il une peau si blanche qu’elle ressemblait à un fantôme ? Il faut dire que sa tenue entièrement noire et ses cheveux tout aussi sombres ne faisaient que souligner sa pâleur. Heureusement, être confondue avec un spectre ne la vexait nullement. Yin Hua était bien vivante, tout comme le jeune homme en face d’elle. Elle avait juste besoin de lui prouver que son existence était bien réelle, et la seule idée qui lui vint fût de pincer le garçon sans même lui en demander la permission. Est-ce qu’un fantôme était capable de toucher une forme vivante ? Pour Yin Hua, la réponse était évidemment non. Pourtant, l’inconnu persistait dans sa conviction qu’elle n’était pas humaine, trouvant encore des arguments pour contredire ses propos. Même si, ses arguments laissaient vraiment à désirer. « Les films et les dramas sont de la fiction, pas la réalité. » Peu importe le genre, il fallait arrêter de croire que ce que montrait l’écran reflétait la réalité à cent pour cent. Le romantisme à la coréenne en est un exemple, une supercherie à laquelle de nombreux étrangers croyaient.

Si ses mots ne suffisaient pas à le convaincre, alors tant pis, elle jouerait le rôle d’un fantôme le temps d’une soirée. Qui sait, peut-être qu’un jour elle endosserait le rôle d’un fantôme dans un drama. Ses prunelles sombres observaient un peu plus attentivement le garçon, qui semblait ne pas réellement la fixer, comme s’il regardait une entité ailleurs. Mais, derrière elle, il n’y avait absolument rien, juste un mur défraîchi. Cette attitude étrange la poussa par réflexe à agiter sa main devant lui sans aucune réaction particulière de sa part. Ne la voyait-il pas ? Yin Hua n’eut pas besoin de mettre longtemps à comprendre qu’il était malvoyant, voire totalement aveugle. Au moins, l’avantage était que s’il croisait réellement une créature de la nuit et de l’épouvante, son apparence ne l'effrayait pas, contrairement au son qu’elle pourrait émettre. Qu’est-ce qui était le mieux entre ne rien voir et ne rien entendre ? La chinoise ne saurait choisir. « Si cela t’enchante de me prendre pour un fantôme, fait-le. » La chinoise n’avait pas l’intention de débattre toute la soirée à ce sujet, d’autant qu’elle n’avait aucun intérêt particulier à le faire changer d’avis. « Je n’ai absolument rien vu, mis à part un rat fuyant et des araignées tissant leur longue toile. » Elle laissa un léger soupir s’échapper de ses lèvres, détournant son regard un instant de lui pour observer ce qui l’entourait. Non, cette maison prétendument hantée n’avait rien de terrifiant. Au contraire, elle percevait la beauté dans les détails, comme les rayons de la lune filtrant à travers les fenêtres poussiéreuses et les ombres dansantes des arbres. C’était une atmosphère qui évoquait plus de mystère que de peur, et la jeune femme était prêt à l’explorer davantage.

Le silence s’était installé, mais il fût vite interrompu par le cri strident d’un corbeau. « Je continue à explorer les lieux. » dit-elle doucement, le regardant à nouveau. « Si tu veux, nous pouvons continuer ensemble. » La chinoise n’avait pas vraiment peur d’être seule. Sinon, elle ne serait jamais venue dans cette maison dite hantée. C’était son amour pour l’horreur et les histoires d’épouvante qui l’avait poussé à venir. Elle prit le pas, avançant dans le couloir sombre d’un pas lent, écoutant les bruits qui l’entouraient ainsi que le pas du garçon. « Ce n’est pas compliqué pour toi de te déplacer dans un endroit inconnu ? » Yin Hu avait bien remarqué la canne qu’il tenait dans sa main, grâce à laquelle il pouvait se déplacer.