Est-ce que la vie tente de me dire quelque chose ? Je n’ai jamais rien fait pour contredire mes parents, j’ai toujours suivi leurs directives hormis ce secret d’amant depuis mon mariage. Est-ce que le karma tente de me dire que je fais le mauvais choix ? Si c’est réellement le cas, pourquoi a-t-il fait en sorte que je tombe enceinte de mon amoureux ? Est-ce que c’est un moyen de me dicter que mon mari est un homme bien malgré tout ? Je ne sais pas. Je n’ai pas la tête de peser les pour et les contres de quiconque ici et maintenant. Je viens à peine de me réveiller d’une opération qui changera mon corps à jamais. Ce bandage contre ma poitrine, je n’ose même pas le regarder pour ne pas me dégoûter. Une femme qui a uniquement un sein. Je n’ose toujours pas le croire que ça soit vrai désormais. Mon cauchemar qui ne me laisse pas tranquille. Pourquoi a-t-il fallu que je tombe malade et pourquoi a-t-il fallu que je sois à ce point malade pour avoir une opération ? Certes, je ne suis pas à plaindre contrairement à certaines personnes. J’aurais pu avoir pire. J’aurais pu être gravement malade et de ne pas m’en sortir. Vous savez, on reste humain et on se plaint même lorsque nous avons la bouche pleine.

Parlant de bouche pleine ; c’est également le cas, maintenant. Je viens à peine de me réveiller de mon opération et je suis désormais capricieuse. La cuisine de mon mari me manque étrangement dans un moment comme celui-là. Toutefois, je dois manger un menu spécial pour reprendre des forces. Je grimace à cette idée. Ça manque de saveur, de beautés, d’odeurs délicieuses. Ce n’est pas alléchant. On dit qu’on peut manger par les yeux si c’est très bien apprêté, ce n’est pas le cas maintenant. Enfin, je ne ferai pas la fine bouche. Mangeant quelques bouchées aucunement satisfaites de mon repas et l’appétit qui me manque. Je soupire doucement en jouant avec ma nourriture au bout de mes baguettes. J’imagine de bons petits plats qu’on pourrait me faire et bizarrement, je salive d’avance. Étrange, n’est-ce pas ? « Ça serait gentil, je suis habituée à notre cuisine. » Je ne m’en cache pas. On cuisine de temps en temps ensemble tout comme chacun notre tour. Ae jin a créé un lien entre Jin woo et moi. Nous étions des étrangers et depuis sa naissance, j’ai appris à me fier sur lui lorsque ça concerne notre fille. Puis il y a maintenant. Je n’aurais jamais pensé qu’il soit aussi choqué d’apprendre que j’étais malade au point de se négliger. En fait, j’ai encore du mal à le croire. Suis-je si importante pour lui ?

Jin woo est si attentionné, compréhensible, à l’écoute. Ça me perturbe qu’il soit si bon garçon et trop gentil. Il est serviable. Je crains que certaines personnes puissent profiter de sa gentillesse, mais en même temps, je connais très peu sa vie. Est-ce qu’il est toujours aussi discret, toujours aussi lui ? Comment est-il avec ses amis ? Est-ce qu’il en a ? Je me pose cette question, car je n’ai jamais entendu parler de virer entre potes depuis que nous sommes ensemble. Je sais qu’il a parfois des voyages d’affaires, mais ni plus ni moins. Je le regarde attentivement et je l’analyse. Je pourrais dire que c’est la première fois que je fais ça, mais je suis davantage confuse pour le faire réellement. Les questions apparaissent, mais disparaissent aussitôt par la fatigue et mes délires. Je suis totalement ridicule. Une si belle personne et je suis parfaitement le contraire. Horrible personnage. Horrible pour avoir un amant. Tromper mon mari pour un homme rancunier, limite esprit vengeur et boudeur. « Non, mais il n'a rien demandé. Puis, il aurait fini par l'oublier. » Finis-je par lui répondre. Autant rien lui cacher jusqu’au bout et je n’ai pas la force non plus de mentir. Il est au courant de toute ma vie. « Quels défauts ? Ta timidité ? Ta discrétion ? Ta bonté ? Ton caractère doux ? Et encore, tout ça pour moi, ce sont des qualités. » Hormis le fait qu’il soit transparent. Même à notre mariage, il était trop discret, mais ça, chacun sa façon de gérer les foules. « Tu crois ? » Fis-je en me frottant un peu les yeux de fatigue avant de le regarder de peine et de misère. Mes yeux se font tellement lourds. « Je suis lasse des montagnes russes d’émotion avec lui... Je préfère largement la tranquillité d’esprit que... tu... Me procures... » Aucune prise de tête comme maintenant. Une discussion calme et dans la sérénité qui me permet de m’endormir. Oupsie.

Jin Woo avait conscience d’être trop gentil, trop serviable, trop doux, trop discret également ; Et plus que le complimenter, on lui avait souvent reproché ces traits de sa personnalité. Pourquoi il ne se rebellait pas ? Pourquoi n’était-il pas franc et ne disait pas lorsque quelque chose ne lui convenait pas ? Pourquoi n’était-il pas plus bavard ? Pourquoi restait-il dans son coin au lieu d’essayer de s’intégrer ? Pourquoi ne faisait-il pas plus d’efforts ? Des tas de questions que le garçon avait eu l’occasion d’entendre, sans jamais avoir réellement de réponses. Pourtant, il essayait de se faire entendre, il essayait de satisfaire tout le monde, cependant il ne pouvait pas changer l’homme qu’il était. Lui était incapable d’interpréter un rôle qui ne lui correspondait pas, il n’était pas aussi bon acteur, même s’il était particulièrement doué pour dissimuler tous les maux qui lui martelaient l’âme. Il était juste lui mais peu étaient les personnes à l’apprécier pour le garçon qu’il était ; en règle générale, on préférait profiter de sa bonté et sa pseudo naïveté, plutôt que créer une amitié sincère. Hors, Jin Woo s’en accommodait ; il avait grandi ainsi après tout et, vraisemblablement, peu importait les différentes expériences, il était incapable de changer. Son entourage passait toujours avant lui-même, qui que ce soit, parce qu’il ne savait pas être égoïste et que, du moment que les autres étaient heureux, alors il l’était aussi. Sa femme le trompait cependant il la comprenait, parce qu’il avait conscience de ne pas être le meilleur mari qu’elle pouvait avoir, mais malgré tout il restait à ses côtés et l’écouter. Parce qu’elle en avait besoin, parce que lui ne s’imaginait pas la laisser seule dans de telles circonstances et, l’entendre parler, cela lui faisait de la peine. Ae Cha était affectée par l’absence de son amant, lui n’était probablement pas l’homme qu’elle souhaitait avoir à son chevet, au réveil, et il était désolé pour ça.

Au lieu de lui répondre, Jin Woo pensa plus judicieux de rester silencieux puis, de toute manière, il ne savait pas quoi lui dire afin de la réconforter. Il ne connaissait pas le garçon en question hors il ne s’imaginait pas non plus mieux que ce dernier. « Si c’était des qualités, tu n’aurais pas eu besoin d’aller voir ailleurs. » Rétorqua-t-il doucement, sans l’once d’un reproche dans le son de sa voix, il s’agissait d’une simple constatation. « Je sais que je suis loin d’être la meilleure compagnie. Tout le monde n’aime pas ça puis je le vois bien autour de moi de toute façon. » Il était toujours la personne de trop, celle qui n’était pas réellement à sa place au milieu d’un groupe, néanmoins il ne s’en offusquait pas. Parce qu’il comprenait, parce qu’il savait qu’il était différent et que c’était de sa faute, s’il n’était pas en mesure de s’intégrer. « Oui, je le crois » Rien n’était certain, quant à l’avenir, néanmoins il désirait la rassurer, lui éviter tout stress et sa femme avait sérieusement besoin de repos. « Je comprends. » Lui souffla-t-il d’un ton toujours aussi tendre, tandis qu’il se relevait afin de replacer correctement le draps sur elle. Morphée semblait l’appeler, ce qui n’était pas étonnant au vu de l’opération qu’Ae Cha venait de subir, alors Jin Woo choisit de se taire, de ne pas poursuivre la conversation. En silence, il retrouva sa place auprès du lit, l’observant calmement, une fine esquisse au bord des lèvres, alors que la jeune femme s’endormait finalement, épuisé. Son épouse allait avoir besoin d’un long moment pour récupérer cependant, peu importait ce qu’il se passait, lui était prêt à rester à ses côtés et la soutenir, si elle en éprouvait la nécessité.

Dans une vie idéale, je ne serai pas là. Je ne serai pas couchée sur ce lit d’Hôpital en train de tomber de sommeil. Jin woo ne serait pas là, il aurait une femme aimante et compatissante auprès de lui, s’occupant de sa famille à lui. Un moment bien parfait. Quant à moi, je serai avec mon amant et notre fille. Souriant, gambadant dans une pairie remplie de fleur, etc. Un moment parfait. Toutefois, la perfection n’existe pas. Je ne suis pas la femme parfaite que quiconque semble dire. Mon amant n’est pas aussi parfait que je le prétends qu’il soit. Nous avons tous les deux des défauts. Deux caractères incompatibles et pourtant, nous avons fait un enfant. Un enfant dont je refuse qu’il côtoie. Je vis une vie dans l’ombre cherchant réconfort de ma fausse vie conjugale. Évitant d’apprendre à connaître Jin woo, évitant de lui tenir compagnie, évitant quasiment chaque interaction. Je suis méchante avec lui, je l’ignore, je le blesse et lui, il n’a jamais rien demandé en retour. On est tous les deux dans le même bateau. On aurait pu chercher des solutions à notre problème de mariage arrangé et au lieu, je suis odieuse avec lui. Il n’a rien fait, c’est une victime de ma méchanceté.

Le Karma existe. Sans avoir été méchante avec mon époux, je ne serai pas là actuellement. Je n’aurais peut-être pas eu une fille avec un autre homme. Peut-être que nous entendions merveilleusement bien ou qui sait, on aurait fini par divorcer pour des raisons x. Idéalement. Malheureusement, j’ai fait les choses à ma tête. Choisissant l’égoïsme, agissant dans les plus grands secrets, batifolant avec un homme totalement jaloux. Je mérite amplement ce que je vis actuellement. Pas Jin woo. Il devrait vivre sa vie comme il entend. Me faire du mal, redonner la pareille au lieu d’être trop gentil à mon égard. Pourquoi avoir reconnu ma fille ? Pourquoi ? Je me retrouve confuse. Je suis perdue. Je ne sais pas du tout comment interagir avec lui et plus que le temps passe, c’est de pire en pire. Je commence à regretter, mais en même temps non. Je l’apprécie en tant qu’ami, mais... Je suis déstabilisée. Il a énormément de qualités, je lui lève mon chapeau. C’est un homme merveilleux. Il a tout pour être heureux, mais c’est son côté effacé qui pose problème. Il n’a pas de courage, il n’a pas ce cran. Il manque ce petit quelque chose qui le rend exceptionnel. Je divague. C’est un des effets dû à l’opération. Un très bel homme, mais il a un mais qui me chatouille.

D’ailleurs, il le mentionne. Je le regarde d’un air désolé avant de baisser ma tête : coupable. Il a touché une corde sensible. Je regrette de ne pas être franche avec lui. D’être cachottière et de vouloir vivre ma vie comme je l’entends, mais tout ça... Cette vie secrète est de plus en plus impossible. Inaccessible. C’est ce qui rend la chose excitante, mais très dangereuse à la fois. « Ne dis pas ça. En ce moment, tu es la meilleure compagnie qui soit. Je suis très contente de te voir ! » Tentais-je de le réconforter. Il va falloir qu’il augmente sa confiance en soi. Ça ne l’aide pas du tout dans ses relations. Il manque d’assurance, qu’il arrête de s’effacer et qu’il prenne sa place malgré tout. Si jamais il a un contrat, il va devoir jouer le tout pour le tout. C’est comme ça lorsqu’on est avocat, c’est notre réputation qui est en jeu et il faut se battre pour gagner le procès. Il va falloir que je réfléchisse comment l’aider à reprendre confiance en lui.

Hélas, je voudrais continuer la conversation. Continuer de discuter avec lui et d’apprendre un peu plus à le connaître. Lui tenir compagnie comme il me tient compagnie. Cependant, le sommeil m’appelle de plus en plus. Mes paupières sont lourdes. J’ai à peine senti la couverture remontée sur moi que je tombe dans les bras de Morphée. À quoi je rêve ? Je ne sais pas, mais c’est rare que je puisse dormir aussi profondément sans me soucier du babyphone. Je peux enfin dormir sur mes deux oreilles et ronfler légèrement.