Losing yourself

@Kang Eun Woo

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Poings écarlates, en lambeaux. Trahissent le récit intense d'une nuit dans l'arène, où chaque coup a laissé son empreinte sur ses jointures douloureuses.
L’arène, là où les mirettes engourdies s'ouvrent comme des hublots devant le spectacle rougeoyant du carnage. Le goût ferrailleux traîne encore dans sa bouche, un reliquat impitoyable des empoignades de la veille. Sur son faciès se dessinent les stigmates ; des blessures qui racontent l'épopée de la nuit écoulée comme des fables de la rue, incrustés sur sa peau comme des trophées.

Il a raflé son trône la veille, mais aujourd'hui, les douleurs sont encore là, bien plantées dans sa carcasse.

Dans sa tête, y a ce désir impérieux de métamorphoser ses pensées, de croiser une âme capable d'égayer sa soirée solitaire. Une envie irrésistible d'effacer les souvenirs, de se laisser emporter par l'éphémère étreinte de l'insouciance nocturne.
Dans l'incapacité de s'adonner à ses habitudes poudreuses, il arpente les clubs à la recherche d'une échappatoire. Les méandres du monde extérieur, il s’en fout, mais c'est dans ces oasis nocturnes qu'il trouve des individus qui semblent plus ou moins à la hauteur. C'est là, sous les stroboscopes étincelants et au son assourdissant des basses, qu'il espère se perdre, même brièvement.

Il a l’esprit déjà bien éméché.

Le geste un peu hésitant quand il commande un énième verre.

Son regard, à demi voilé par les vapeurs d'alcool, se fixe soudain sur une silhouette familière, presque éthérée dans l'obscurité feutrée de l'endroit. Un frisson d'intrigue parcourt son échine. C'est comme si le destin, d'une main invisible, lui avait joué un tour en lui présentant cette figure du passé. Il sent son cœur battre un peu plus fort, son esprit s'embrouiller davantage sous l'effet du mélange d'alcool et d'émotions contradictoires.
Il se ramène vers lui comme un automate, balayant d'un revers de main toutes les têtes qui se trouvent sur son chemin. Pas de place pour les conneries, pas maintenant. Il reconnaît ce visage, avec son charme envoûtant, son corps qu'il a autrefois apprécié. Et ce visage-là, bordel, il ne peut pas s'empêcher de réagir, sauf que maintenant, il peut voir dans ses yeux qu'il a tapé dans la came. Les pupilles dilatées, la lueur éteinte. C'est comme si le passé se dressait devant lui, tout défoncé et cassé. « Eun Woo. » syllabes interdites qui s’échappent de sa gorge.

Ji Hoon, il n'a jamais été du genre à faire dans la tendresse. Pas le genre à distribuer des câlins et des mots doux. Il possède ce don particulier pour dénicher les mots qui pénètrent le cœur comme des poignards, toujours prêt à les enfoncer plus profondément, à les tournoyer avec un sadisme insidieux. Salaud à aimer dans la douleur ; artiste de la cruauté qui trouve satisfaction dans les brisures des autres, et s’adonne à la douceur quand tout vole en éclats autour de lui.

Malgré tout, il ne l’avait jamais poussé dans ces tourments qui chamboulent l'esprit et percutent les sens. Et là, face à cette réalité sordide, le mot « putain » s'échappe de ses lèvres dans un souffle empreint d'incompréhension et de colère. Sa main se referme sur le poignet d'Eun Woo et le tire vers un coin plus tranquille, loin du tumulte des corps qui s'agitent. Là, à la lueur tamisée, il peut l'examiner de plus près, soulevant son menton pour scruter les pupilles dilatées, trahissant la prise d’une drogue. « Tu t’es drogué ? » il marque une pause, la tension dans l'air est aussi épaisse que le brouillard. « Parce que t'es clairement pas juste ‘bourré’ » il sait pas trop pourquoi, mais sa voix résonne avec une colère palpable. « J’avais pas pour projet de babysitter, mais tu vas pas me laisser le choix. » Un souffle impatient s'échappe de ses narines, chargé de l'irritation qui serre son cœur, comme un vent ardent qui évente la fureur intérieure qui l'embrase. « T’as la thune pour un taxi ? » parce qu’il ne compte pas payer, malgré les sommes empochées la veille. Se la jouer chevalier servant, c'est pas vraiment son truc.