Histoire — tes parents ont divorcé quand tu avais quatorze ans. décision toujours incomprise aujourd’hui, t’as pas eu le choix que de l’accepter et de faire avec. décision qu’on ne t’expliquera pas vraiment, ou alors que par des mots vagues et abstraits, te laissant alors calculer le reste dans des silences lourds.
「 c’est comme ça Jian, ça arrive 」

— tu accepteras l’idée que tout était ta faute ; que ta décision de devenir trainee a retourné les esprits car c’était là un choix qui ne semblait convenir à personne. sauf à toi. aujourd’hui encore tu restes campé sur cette idée : tu es coupable (d’avoir été pris dans les vagues de ces papiers signés et de t’y noyer)

— t’as grandi avec ce poids sur les épaules. et c’était comme si un choix t’était demandé :
「 veux-tu vivre avec papa, ou maman ? lequel des deux aimes-tu le plus, Jian ? 」
déchirement intérieur, le cœur souffrant à chaque fois que tu croisais leurs regards. t’as jamais pu faire un choix. une décision qu’on ne t’avait jamais demandée de prendre explicitement cela dit. tu avais interprété les silences seul ; et le manque de communication de tes parents était sans doute à blâmer.

— tu verras alors des signes là où il n’y a rien. le genre à s’inquiéter quand tu ne reçois pas de réponses, pensant alors avoir fait quelque chose de mal même s’il en est rien. tu t’excuseras, parfois, sans que l’on sache réellement pourquoi (mais ton esprit t’aura persuadé que tu avais mal agi).

— naître Ko a fait de toi un enfant star : pas que tu le voulais vraiment, cela dit. mais tu ne comprenais pas, plus jeune, ce que ces casting que ta mère te faisaient passer voulaient dire. c’était amusant, ta mère semblait heureuse : alors tu le faisais. tu as la chance d’apparaître dans un film de ton père, y jouant le fils de son personnage. un rôle fait sur mesure, presque car tu n’avais pas grand chose à dire. et la plupart de tes apparitions se ressemblaient, tes personnages n’ayant pas ou peu de mots à prononcer.car tu ne parlais jamais assez fort, Jian.
et tu auras la chance d’assister au tournage d’un clip musical. tu partiras émerveillé avec ce spectacle offert. et ta mère t’inscrira alors à des cours de danse, et te permettra aussi de suivre une formation en danse classique durant deux ans.

— 「 j’ai toujours voulu avoir une fille, je ne peux être plus heureuse désormais 」
des mots prononcés par ta mère et des mots qui viendront alors te hanter. des mots auxquels tu réfléchiras seul de ton côté, et des silences que tu ne comprendras pas comme il le fallait. ton plus grand défaut est sans doute ton esprit mal assuré.
tu es ton propre démon, Jian

— 「 j’ai la chance d’avoir un autre petit garçon, et je compte mettre ma carrière en pause afin de passer le plus possible avec lui 」
des mots prononcés par ton père après l’annonce de la naissance de son second fils. et tu seras alors oublié, le temps n’était plus disponible pour toi même quand tu venais à la maison. tu joueras au baseball tout seul, décidant finalement de plus y jouer : allant même jusqu’à déclarer que tu détestais ce sport maintenant.

— et tu en veux un peu à tes parents de ne t’avoir jamais dit combien ils t’aimaient ; maladresses d’une jeunesse qui était passée trop vite pour eux, tu en subis les conséquences aujourd’hui.
tu t’entends bien avec ton beau-père. tu t’entends bien avec ta belle-mère. tu adores ton petit frère, le prendre dans tes bras a été quelque chose de magique. tu t’entends un peu moins bien avec ta demi-sœur mais c’est l’adolescence, qu’on dit. ça passera, qu’on répétait. tu t’entends bien avec tout le monde … alors pourquoi as-tu cette boule au creux de l’estomac à chaque fois que tu passes quelques jours chez l’un ou chez l’autre ? pourquoi as-tu cette sensation constante d’être transparent, ou d’être moins bien que ton frère ou ta sœur ? pourquoi n’as-tu pas réussi à faire briller les yeux de ta mère de cette façon ou faire rire ton père ainsi ? pourquoi as-tu tout raté et pourquoi rates-tu tout encore aujourd’hui ?

— tu ne pouvais être plus heureux que lorsque l’on t’a annoncé que tu allais débuter. Les entraînements allaient enfin payer, et toi aussi tu allais enfin pouvoir briller. une annonce qui ne ravira pas ton père comme tu l’avais espéré : il souhaitait à présent que tu n’entres pas dans cet univers impitoyable. parce que t’avais pas les épaules pour, d’après lui. et ta mère avait été heureuse : car c’était grâce à elle, après tout. non ? ce n’était pas ton talent, ton travail, ta rigueur : mais c’était grâce à elle (et encore moins grâce à ton père qui n’avait jamais soutenu sa décision de t’inscrire aux cours de danse)

— tu essaies de toujours donner le meilleur de toi-même sur scène. tu essaies d’être le plus avenant et le plus conciliant quand il s’agit des fans :
「 tu donnes, tu donnes mais tu reçois quoi en retour, Jian ? 」
tu essaies d’être le plus présent sur les réseaux sociaux, de répondre aux fans ou d’apparaître en live pour leur faire plaisir. on dira parfois que tu cherches les compliments ; c’est un peu le cas. tu cherches surtout à te rassurer au quotidien. tu as peur que les fans se lassent et t’oublies. parce que t’es pas quelqu’un qui marque les esprits, d’après toi. tu vis ton métier, tu respires ton métier ; parce que t’as que ça désormais.